COVID-19,PAPA ABDOULAYE SECK:IL FAUT RETENIR LA NÉGATION…

Gestion Covid19 : Population confinée et Besoins Alimentaires .

Regards Croisés sur une Contribution du
Docteur Papa Abdoulaye Seck
Membre de l’Académie d’Agriculture de France
Ambassadeur de la République du Sénégal à Rome
Ancien ministre de l’agriculture et de l’équipement rural du Sénégal
Il acte sa contribution intitulé  » La Gestion du Coronavirus ou Covid19 : Population confinée et Besoins Alimentaires .
Dr Papa Abdoulaye Seck est quadruple Académicien du Sénégal (ANST), de l’Afrique (AAS), de France (AAF) et Mondiale (TWST) Chercheur émerite auteur de nombreuses publications
Dr Papa.A.Seck considère que le monde fait face à une équation à double détente : vaincre à tout prix l’ennemi invisible et assurer une réponse adéquate des capacités productives de nos écosystèmes pour nourrir l’homme, aujourd’hui et demain
Pour le continent africain, la situation actuelle pourrait avoir des répercussions sur les
performances de nos agricultures et sur la satisfaction de nos besoins, et de ne jamais oublier que l’Afrique est un continent importateur net de produits agricoles.
Dr Seck est de ceux qui pensent que l’homme peut être contraint à changer
radicalement son port, ses attitudes et ses comportements et choisir le confinement
en lieu et place du travail, et n’a jamais manqué de prescrire, à nos compatriotes, nos proches et collaborateurs, sérénité, vigilance, courage et respect des recommandations
scientifiques et des mesures édictées par les autorités publiques.
Quid de l’agriculture africaine face aux besoins alimentaires des populations
confinées ?
De l’avis de Dr Papa Abdoulaye Seck  » il faut retenir la négation de la formule selon laquelle « l’homme est à la mesure de
toute chose » car il peine encore à transformer l’incertitude en risques. Or l’incertitude,
on la subit et le risque, on le gère : ce dernier étant la probabilité d’occurrence d’un
événement défavorable.
Un fondement scientifique ou il tire toutes les évidences pour faire des constats tirés. de tout un belvedere soumis à une boussole d’observation et d’orientation que:

  • Les changements climatiques, avec leur cortège inestimable de conséquences
    fâcheuses, questionnent notre existence. Ils sont même la source nourricière d’un
    certain fatalisme, en dépit des progrès scientifiques ;
  • Les crises alimentaires n’ont pas encore disparu de nos radars, malgré le capital
    de connaissances et de technologies, généré au quotidien par l’homme ;
  • La construction de systèmes alimentaires productifs, durables et équitables, se
    complexifie à cause de l’érosion de la biodiversité et de la disparition
    d’écosystèmes, imputables à des pratiques agricoles destructrices de
    l’environnement et à une irresponsabilité humaine.
    Cette digression renvoie à une évidence indomptable : le monde est riche de ses
    chorégraphies difficilement saisissables.
    Le confinement, en lieu et place du travail, pour sortir de l’ornière
    A l’image du monde entier, nous sommes présentement en Italie dans un pays
    fortement affecté par la pandémie du coronavirus. Considérant la situation très difficile,
    nous n’avons jamais manqué de prescrire, à nos compatriotes, nos proches et
    collaborateurs, sérénité, vigilance, courage et respect des recommandations
    scientifiques et des mesures édictées par les autorités publiques.
    Nous avons eu l’administration de la pertinence de cette assertion, à la suite d’une
    scène invraisemblable, vécue récemment au niveau de « la ville éternelle », Rome. En
    effet, au sortir d’une banque, un piéton a presque pris la fuite pour ne pas nous
    rencontrer. Son signal fut clair et perceptible : si cette pandémie persiste, alors,
    consciemment ou inconsciemment, nous allons remettre en cause notre volonté
    commune de vivre ensemble. Après cette séquence, à la limite insolite, nous avons
    traversé Rome pour rentrer chez nous, avec la forte impression d’être dans une ville
    nouvelle au vu de la perte de nos repères : des feux de circulation inutiles, des
    magasins fermés, un calme olympien dans les rues, des personnes déguisées, etc.
    Dans cette atmosphère tendue, nous sommes loin de connaitre et de décrypter tous
    les secrets de notre univers d’évolution.
    Face à ce tohu-bohu, il va sans dire que, à
    tout moment, ce grand champion qu’est l’homme peut être contraint à changer
    radicalement son port, ses attitudes et ses comportements et choisir le confinement
    en lieu et place du travail.
    Quid de l’agriculture africaine face aux besoins alimentaires des populations
    confinées ?
    Nous sommes face à une équation à double détente : vaincre à tout prix l’ennemi
    invisible et assurer une réponse adéquate des capacités productives de nos
    écosystèmes pour nourrir l’homme, aujourd’hui et demain
    Pour le continent africain, la situation actuelle pourrait avoir des répercussions sur les
    performances de nos agricultures et sur la satisfaction de nos besoins. Et, n’oublions
    jamais que nous sommes un continent importateur net de produits agricoles.
    Au demeurant, nous devons nous rappeler la crise de 2008 et les «émeutes de la
    faim », qu’elle avait induites dans plusieurs capitales africaines, pour rationnaliser
    notre réflexion sur le devenir.
    Pour notre part, toute action relative au secteur agricole africain doit considérer les
    éléments suivants :
  1. les investissements des petits producteurs risquent de baisser à cause de
    la chute inévitable des transferts de fonds des émigrés ;
  2. le ralentissement des campagnes de commercialisation va impliquer une
    baisse de revenus et être le deuxième facteur de réduction de l’investissement
    des exploitations familiales ;
  3. l’Afrique est fortement menacée par une crise acridienne, déjà repérable en
    Afrique de l’Est ;
  4. les périodes de préparations des campagnes agricoles vont être plus
    courtes que d’habitude ;
  5. la contractualisation amont/aval va être menacée par l’incertitude ;
  6. le tissu industriel agricole va être soumis à de rudes épreuves dues à l’arrêt
    prématuré des campagnes de commercialisation agricole dans certains pays,
    d’où la difficulté majeure de sécurisation de la ressource à transformer ;
  7. le marché agricole international va certainement voir son efficacité ralentir,
    dicté par un repli pour la satisfaction des marchés domestiques.
    Face à tous ces facteurs mentionnés, les agriculteurs africains doivent revoir leurs
    cahiers des charges, de même que les décideurs quant à leurs stratégies de soutien.
    Sans être exhaustif, nous formulons quelques pistes:
    • suggestion 1: revoir significativement à la hausse les subventions aux intrants
    (semences, engrais, produits phyto, matériel agricole) destinées aux petits
    producteurs pour sécuriser l’offre agricole domestique.
    • suggestion 2 : réduire le prix du mètre cube d’eau pour renforcer l’agriculture
    irriguée en vue de fixer les populations, augmenter la productivité et mieux étaler la
    production dans le temps et dans l’espace.
    • suggestion 3: développer dès à présent un plan de riposte pour une éventuelle
    crise acridienne pour ne pas compromettre l’approvisionnement du marché
    domestique et les revenus ruraux.
    • suggestion 4: différer les remboursements de tous les prêts bancaires relatifs au
    secteur agricole pour éviter une perte de solvabilité bancaire des acteurs ruraux.
    • suggestion 5: élaborer un plan de soutien des industries agricoles de
    transformation pour enregistrer plus de valeurs ajoutées.
    • suggestion 6 : développer l’autoconsommation en milieu urbain par la promotion
    de l’agriculture urbaine et péri-urbaine. Pour ce faire, on peut penser, entre autres, au
    micro-jardinage et aux cultures sous-abris.
    • suggestion 7: consolider les chaînes de distribution alimentaires en vue d’avoir des
    passerelles entre zones déficitaires et zones excédentaires pour réduire les coûts de
    transactions et favoriser l’établissement de justes prix.
    Aujourd’hui, plus que jamais, la solidarité humaine est plus visible, plus lisible et plus
    palpable. S’agit-il alors d’un départ nouveau où chacun de nous est enfin conscient
    « qu’il n’est ce qu’il est que dans et par un système » ?
    La Rédaction
  • Docteur Papa Abdoulaye Seck
    Membre de l’Académie d’Agriculture de France
    Ambassadeur de la République du Sénégal à Rome
    Ancien ministre de l’agriculture et de l’équipement rural du Sénégal

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