Quand l’intelligentsia se transforme en tribunal : la tribune de la honte

La nomination de Macky Sall au Conseil d’administration de la Fondation Mo Ibrahim ? Elle me laisse de marbre. Tout comme les gesticulations de Seydi Gassama lorsqu’il prétend défendre les droits humains. Ces choix, comme tant d’autres émanant de fondations, d’ONG ou d’acteurs autoproclamés « philanthropiques », relèvent trop souvent du lobbying ou de la communication de façade. Je n’y accorde aucune importance.
Ce qui me révulse davantage, en revanche, c’est d’entendre Aminata Touré s’en offusquer. Son zèle passé dans l’exécution de ces « basses besognes » qu’elle impute aujourd’hui exclusivement à Macky Sall reste encore vivace dans nos mémoires. Elle, qui hier insultait les opposants que nous sommes, elle, qui obéissait sans scrupules aux injonctions de son camp, gère aujourd’hui le carnet de rendez-vous de Sweet Beauté. Quelle indécence ! De tous ceux qui ont dénoncé cette nomination, seul Adama Gaye me semble constant et cohérent.
Quant à la lettre signée par 52 « intellectuels », elle révèle surtout l’ampleur de la mauvaise foi d’une partie de notre élite. Leur critique n’est pas guidée par un souci de justice ou de vérité, mais par un opportunisme politique grossier.
Non, ce n’est pas la Fondation Mo Ibrahim qui m’indigne aujourd’hui. Mon indignation est ailleurs.
La sentence est tombée : nos forces de défense et de sécurité seraient des criminels. C’est, en substance, ce que ces 52 « intellectuels » affirment dans leur tribune à charge. Ils écrivent, sans sourciller : « Entre 2021 et 2024, des dizaines de manifestants pacifiques ont été tués par les forces de sécurité. »
Une telle phrase, formulée avec aplomb mais sans la moindre preuve, illustre à elle seule le naufrage moral de ses auteurs. Des encartés de salon, drapés dans la toge de la prétendue lucidité, mais qui s’autorisent à accuser sans qu’aucune enquête judiciaire indépendante n’ait établi de telles responsabilités. Pas un jugement, pas un rapport officiel. Mais eux, déjà, prononcent la condamnation.
Pire encore : ils s’attaquent à une institution républicaine liée par le devoir de réserve, donc incapable de se défendre publiquement. Ce procédé est non seulement lâche, il est dangereux.
Mais ne soyons pas naïfs : cette tribune n’est pas un acte isolé. Elle s’inscrit dans une manœuvre coordonnée, une jonction désormais limpide entre des intellectuels activistes et les promoteurs de l’abrogation partielle de la loi d’amnistie.
Un combattant autoproclamé des droits humains s’est même permis d’attaquer deux colonels à la retraite, dont le seul tort fut de se prononcer contre une loi interprétative aussi scandaleuse que partisane. Une loi dont le dessein est désormais clair : jeter les FDS en pâture.
Ensemble, ils forment une véritable mafia politico-intellectuelle, dont l’objectif est de livrer nos institutions à la vindicte, de blanchir les probables fauteurs de troubles, et de consacrer une version partisane de l’histoire. En somme : sauver les révolutionnaires du jacuzzi et crucifier ceux qui ont tenu la République debout.
Nous devons tracer une ligne rouge. Si nos FDS ne peuvent se défendre, il revient à des citoyens libres et dignes de le faire à leur place. Il faut que les noms et visages de ces 52 accusateurs soient rendus publics, et que des plaintes soient déposées pour diffamation, diffusion de fausses nouvelles et atteinte à la sûreté de l’État.
Un procureur libre et courageux les aurait déjà convoqués. Car accuser sans preuve les forces républicaines de crimes de sang, dans un contexte aussi inflammable, est une folie irresponsable.
Et si, un jour, nos FDS, lassées d’être traînées dans la boue, décidaient de ne plus tolérer cette humiliation constante, qui viendra pleurer ? Ceux-là mêmes qui les jettent aujourd’hui aux chiens ?
Ce pays vacille, et personne n’ose dire la vérité. Nous, si !
Assez de cette inversion des rôles, assez de ce renversement moral où l’on célèbre les incendiaires et où l’on condamne les pompiers.
Où étaient-ils, ces intellectuels à géométrie variable, quand deux jeunes filles furent brûlées vives dans un bus à Yarakh ?
Quand l’UCAD, la bibliothèque, la faculté des lettres et celle des sciences juridiques furent livrées aux flammes ?
Était-ce l’œuvre des FDS ?
Et où sont passés les 222 universitaires qui, en 2024, théorisaient l’abrogation totale de la loi d’amnistie ? Leur silence, aujourd’hui, est devenu doctrine.
Alors que l’amnistie avait pour alibi de « tourner la page », même si chacun sait qu’elle est le fruit d’une négociation purement politicienne, voilà qu’on tente de la modifier pour l’appliquer de manière sélective. Une loi interprétative honteuse, taillée sur mesure pour sauver un camp et en condamner un autre.
Un intellectuel, s’il mérite ce nom, n’est ni un militant aveugle, ni un pyromane idéologique. Il est d’abord celui qui dérange tous les pouvoirs, celui qui défend le principe avant les postures, celui qui paie parfois sa lucidité du prix du silence.
Inutile de s’opposer à Macky Sall : il ne gouverne plus. Travaillez, avancez, et arrêtez de ramer à contre-courant de l’intérêt national.

Dr. Madior ly
République des Valeurs

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