GUINÉE,MASSACRE DU 28 SEPTEMBRE 2009,LE PROCUREUR ADJOINT DE LA CPI MAME MANDIAYE NIANG EXPRIME SES CRAINTES SUR LA GRÂCE ACCORDÉE À MOUSSA DADIS CAMARA 

Le Procureur Adjoint de la Cour pénale internationale, Mame Mandiaye Niang, vient d’achever sa quatrième visite officielle en République de Guinée, du 19 au 21 mai 2025. 

Durant cette visite, il a rencontré de hautes autorités guinéennes, dont le Bâtonnier de Guinée, des victimes et des membres d’organisations de la société civile, des représentants des Nations Unies et des partenaires internationaux afin d’évaluer l’état d’avancement des procédures pénales nationales menées en lien avec les événements du 28 septembre 2009 au stade national de Conakry.

La mission avait pour principaux objectifs d’échanger sur la grâce présidentielle accordée à l’ancien Président Moussa Dadis Camara et sur la volonté des autorités de poursuivre ses efforts pour traduire en justice les responsables des événements du 28 septembre 2009, conformément au mémorandum d’accord signé entre le Bureau du Procureur (le « Bureau »°) et la République de Guinée le 28 septembre 2022.

Lors de ses rencontres avec le Premier Ministre Amadou Oury Bah et le Ministre de la justice et des droits de l’homme, M. Yaya Kaïraba Kaba, le Procureur  Adjoint Niang a fait part de ses craintes de voir la grâce accordée prématurément à l’ancien Président Dadis Camara porter fortement atteinte aux efforts déployés par la Guinée pour faire reculer l’impunité. 

L’ancien Président est l’un des principaux responsables des crimes commis lors des événements du 28 septembre 2009. Il a été arrêté le 27 septembre 2022 puis condamné, le 31 juillet 2024, à une peine de 20 ans de prison par le tribunal de Dixinn à Conakry. La grâce prononcée en sa faveur a entraîné sa libération immédiate le 28 mars 2025.

« Aujourd’hui, les victimes sont découragées par l’octroi de cette grâce et redoutent que cette décision ne soit annonciatrice d’autres décisions semblables. Conformément aux engagements pris par la Guinée dans le mémorandum d’accord, de rendre efficacement la justice pour les crimes commis, il est essentiel que la procédure d’appel dans le procès principal, ainsi que les procédures judiciaires menées à l’encontre des auteurs présumés de crimes liés aux événements du 28 septembre, puissent aboutir », a déclaré le Procureur Adjoint Niang.

Bien que l’octroi de grâces puisse être une prérogative des États au regard du droit national, le Procureur Adjoint a fait remarquer que de telles grâces accordées pour crimes contre l’humanité pourraient soulever des doutes quant à la volonté de l’État concerné de rendre justice et aller à l’encontre des obligations qui incombent à un État au regard du droit international d’enquêter sur des crimes internationaux et d’en sanctionner les auteurs.

Lors des événements du 28 septembre 2009, 156 à 200 personnes auraient été tuées ou portées disparues et au moins 109 femmes ont été victimes de viols et d’autres formes de violence sexuelle. 

Le Bureau avait salué l’ouverture du procès sur le territoire national en 2022, qui marquait un véritable tournant et constituait un bel exemple de complémentarité. 

Il a également salué  la condamnation l’an dernier, de l’ancien Président Camara ainsi que d’autres responsables pour crimes contre l’humanité. En septembre 2022, le Procureur de la CPI, Karim A.A. Khan  KC  a clos l’examen préliminaire à propos de la situation en Guinée 

aprés avoir conclu que les autorités nationales n’étaient ni inactives, ni réticentes, ni incapables de mener véritablement à bien des enquêtes et des poursuites sur les crimes visés au Statut de Rome commis au stade de Conakry.

Lors de ses rencontres avec les plus hautes autorités guinéennes, le Procureur Adjoint Niang s’est félicité du décret présidentiel sur les réparations et a encouragé les autorités à continuer de tout mettre en œuvre pour répondre aux besoins des victimes en termes de participation à tous les stades de la procédure, pour veiller à leur protection et s’assurer qu’elles obtiennent réparation.

Le Procureur Adjoint a également échangé avec les autorités sur l’importance de commémorer les événements et de poursuivre leurs efforts pour traduire en justice les auteurs de crimes, et sur la manière dont le Bureau pourrait contribuer à des activités et programmes connexes, y compris en leur transférant ses archives relatives à la situation.

Outre ses rencontres avec des représentants du gouvernement, le Procureur Adjoint s’est également entretenu avec des représentants des Nations Unies et de l’Union européenne en Guinée, ainsi qu’avec des membres d’organisations de la société civile. Il a saisi l’occasion pour rassurer les parties prenantes sur l’engagement du Bureau à tout mettre en œuvre pour que justice soit rendue et que les responsables des crimes commis en 2009 rendent des comptes, grâce à une coopération renforcée avec les autorités guinéennes et à une évaluation continu des procédures.

Sur les préoccupations concrètes exprimées par des victimes, le Procureur Adjoint Niang a déclaré : « À l’heure où je quitte la Guinée, je suis rassuré de savoir que le procès se poursuivra au stade de l’appel et qu’il sera mené à son terme, que d’autres procès connexes s’ouvriront et que les réparations des victimes se poursuivront. Il n’y a pas eu de changement de cap. Le Gouvernement a affiché sa volonté d’apporter le soutien nécessaire à l’appareil judiciaire dans sa quête de justice et le Mémorandum d’accord continuera  de guider les engagements mutuels du Bureau et de la Guinée pour que justice soit faite pour les crimes commis en septembre 2009.

Dans cet esprit, le Procureur Adjoint s’est réjoui de l’engagement du gouvernement à traduire en justice les responsables des crimes en cause et a réaffirmé que le Bureau poursuivrait le dialogue constructif et la coopération engagés avec les autorités guinéennes et les partenaires concernés.

Il remercie le Premier Ministre et le Ministre de la justice et des droits de l’homme ainsi que tous les membres du Gouvernement pour le soutien qu’ils lui ont apporté, ainsi qu’à sa délégation, au cours de sa visite.

Le Bureau du Procureur de la CPI mène des examens préliminaires, des enquêtes et des poursuites à propos du crime de génocide, des crimes contre l’humanité, des crimes de guerre et du crime d’agression, en toute impartialité et en toute indépendance. De plus amples informations sur les « enquêtes préliminaires » et les « situations et affaires » 

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